Edouard Morcheplus, "Ma banlieue"
A 16h28, sitôt mon choco BN avalé, je me précipitais sur le palier pour guetter, penché au dessus du garde-corps, la main droite d’Anne Bouclier, mon amoureuse, qui dans les secondes suivantes attaquerait son ascension l’emmenant au 3ème étage. J’avais depuis longtemps minuté avec précision le temps qu’il me faudrait pour que, d’un air naturel contredit par une rougeur intempestive, je la croise, glissant avec élégance sur la rampe de l’escalier, suffisamment proche de sa porte palière pour établir le contact, mais suffisamment loin de l’appartement de madame Sériès, cette commère à qui rien n’échappait et qui pour rien au monde n’aurait quitté son poste d’observation du 2e étage.

“Le chicot du matador”
Jour après jour se devinaient les contours d’une silhouette. Depuis des mois, juchés sur un échafaudage gigantesque, des compagnons avaient, avec une infinie précision, esquissé les traits d’un homme à l’allure conquérante. Quelle ne fut pas notre surprise, et sûrement celle de John Walton, le commanditaire, de découvrir que le seul “jour de souffrance” ménagé dans le mur coïncidait au centimètre près à l’incisive supérieure droite du toréador de la réclame “Email Diamant”, défigurant définitivement le sourire éclatant de l’hidalgo, juste revanche de la race taurine.
Edouard Morcheplus, "Ma banlieue"
